L'Europe va faciliter l'accès des particuliers aux actifs privés

La deuxième mouture de la réglementation européenne sur les fonds à long terme, Eltif 2, entre en vigueur ce mercredi. Les investisseurs individuels seront à la fois plus protégés et plus enclins à détenir des actifs non cotés.

Entrée en vigueur en 2015, la réglementation européenne Eltif (fonds européens d'investissement à long terme), qui vise à stimuler l'économie réelle en apportant des financements de longue durée à des actifs non cotés (infrastructures, PME…), est loin d'avoir remporté le succès escompté. Moins d'une centaine de fonds Eltif ont été lancés à ce jour. « En France, seule une vingtaine d'entre eux ont reçu l'agrément de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et tous sont souscrits par des investisseurs institutionnels », constate Karim Boussetta, chez Moonfare, société spécialisée dans le capital-investissement destiné aux particuliers.

Or cette réglementation devait aussi faciliter l'accès des investisseurs individuels au non-coté. Désireux de diversifier leur portefeuille, les particuliers montrent un appétit croissant pour ces actifs en raison de leur rendement élevé, malgré un risque plus fort et une moindre liquidité.

Nombreux aménagements

Entrée en vigueur ce mercredi, la nouvelle mouture de la réglementation, Eltif 2, devrait enfin amorcer le mouvement. De nombreux aménagements lèvent en effet les contraintes qui pesaient aussi bien sur les investisseurs que sur les sociétés de gestion.

Ces dernières n'auront plus à fournir de conseils d'investissement et de tests de pertinence spécifiques. L'obligation se limite désormais à l'envoi d'un message spécifiant que les souscripteurs doivent pouvoir s'engager sur le long terme. Pour les investisseurs, le ticket d'entrée, initialement de 10.000 euros, est supprimé. Il revient désormais au gérant de fixer le montant minimal pour les particuliers. Autre assouplissement, il n'est plus demandé à ces derniers de ne pas dépasser 10 % de leur portefeuille d'instruments financiers lorsque celui-ci est inférieur à 500.000 euros.

Le champ d'investissement est également élargi : il sera désormais possible d'investir dans les fonds d'investissement alternatifs. « C'est là le changement essentiel de cette réforme, car cela va considérablement accroître la variété et la disponibilité des investissements », explique Karim Boussetta. Titrisations standardisées ainsi qu'obligations vertes sont désormais éligibles.

Gestion de liquidité

Pour mieux protéger les épargnants, la poche des actifs illiquides de l'Eltif est par ailleurs réduite de 70 % à 55 % et un rachat sera possible avant la fin de la durée de vie du produit. Le gestionnaire sera tenu de traiter équitablement tous les investisseurs en utilisant les outils de gestion de liquidité adéquats

Définition

L'AMF définit les Eltif comme des fonds fermés, ou limitant les possibilités de rachats à une part des actifs liquides du fonds, dont le gestionnaire est agréé au titre de la directive AIFM (Alternative Investment Fund Manager).

À noter

Dans sa revue de stabilité financière de fin 2023, la BCE n'a eu de cesse de rappeler les risques de liquidité des fonds d'investissement, exhortant les institutions non bancaires à adapter la fréquence des retraits au profil de liquidité des fonds. Dans l'immobilier en particulier, les retraits ont conduit ces derniers mois à des ventes hâtives de biens, précipitant la chute des prix.

Par Caroline Mignon – Les Echos - Publié le 9 janv. 2024 à 17:20Mis à jour le 9 janv. 2024 à 17:57