Par Laurence Boisseau, Les Echos - Publié le 22 juin 2022 à 10:23Mis à jour le 22 juin 2022 à 13:33
La présidence française de l'Union européenne avait comme priorité de fixer des règles en matière de reporting extra-financier. Elle a atteint son but, in extremis. Mardi soir, les députés européens et les gouvernements de l'Union sont parvenus à un accord avec la Commission sur la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).
Cette directive impose aux entreprises de rapporter leur performance ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Le texte devrait être voté le 29 juin par les Etats membres de l'UE et le 30 juin par la commission des affaires juridiques au Parlement européen. Il vise à rendre les entreprises plus responsables en les obligeant à divulguer leur impact sur les personnes et la planète, mais aussi à mettre fin à l'écoblanchiment.
« Aujourd'hui, les informations relatives à l'impact d'une entreprise sur l'environnement, les droits de l'homme et l'éthique du travail sont parcellaires, peu fiables et facilement détournées. Certaines entreprises ne font pas de rapport. D'autres rapportent ce qu'elles veulent. Les investisseurs, les consommateurs et les actionnaires sont perdus.
Désormais, il sera tout aussi important d'avoir un bilan irréprochable en matière de droits de l'homme que d'avoir un bilan irréprochable », a indiqué Pascal Durand (député français pour Renew Europe), qui a mené les négociations pour le Parlement.
Nouvelles exigences de l'Union européenne
Les nouvelles exigences de l'Union européenne en matière de rapports sur la durabilité s'appliqueront à toutes les grandes entreprises (comptant plus de 250 employés et réalisant un chiffre d'affaires de 40 millions d'euros), qu'elles soient cotées ou non. Environ 50.000 entreprises devront communiquer des informations sur leur impact sur l'environnement, les droits de l'homme, les normes sociales et l'éthique du travail, sur la base de normes communes. Quelques PME cotées (entre un et deux milliers) seront également concernées. Mais leurs déclarations seront plus légères et elles auront la possibilité d'échapper au nouveau système jusqu'en 2028.
Les informations extra-financières seront publiées de manière consolidée, mais une transparence accrue pourra être requise si une filiale opère différemment des autres. Par exemple, si elle présente une politique d'achat plus à risque que les autres sociétés ou si elle émet plus de CO2, elle devra fournir des données plus précises.
Point important, les informations fournies par les entreprises concernant l'impact sur le climat ou les droits de l'homme feront l'objet d'un audit et d'une certification indépendants.
Extraterritorialité
Grande nouveauté, les entreprises non européennes ayant une activité substantielle sur le marché de l'UE (150 millions de chiffre d'affaires annuel) devront suivre des règles de reporting équivalentes. Les Etats membres superviseront le respect de ces règles. Les filiales des groupes non européens devront aussi communiquer dans une section particulière des informations sur l'activité de leur maison mère en lien avec la RSE.
La CSRD sera appliquée en 2024. La manière dont ces informations devront être présentées par les sociétés est actuellement en discussion. L'EFRAG, qui conseille depuis vingt et un ans la Commission européenne sur l'adoption des normes comptables IFRS, a été chargée d'élaborer ces normes extra-financières. Mi-mai, cet organisme a soumis un jeu de 13 normes à une consultation publique.
Après ce texte, les entreprises devront aussi se soumettre à la directive sur le devoir de vigilance, actuellement en discussion. Cette dernière obligera non pas à la transparence ESG, mais à prévenir, à faire cesser ou à atténuer les incidences négatives de leurs activités sur les droits de l'homme (travail des enfants et exploitation des travailleurs, par exemple) et sur l'environnement (pollution ou encore perte de biodiversité.).