Par Amélie Laurin – Les Echos - Publié le 10 mai 2022 à 07:30Mis à jour le 10 mai 2022 à 16:51
Le nouveau comité du label ISR n'a pas chômé. Sous la présidence de Michèle Pappalardo depuis l'automne dernier, l'instance est en train de finaliser les futures règles du jeu de la certification française des fonds d'investissement socialement responsable (ISR).
« Nous espérons caler avant l'été les grandes lignes du nouveau référentiel du label ISR, pour pouvoir le présenter au futur ministre de l'Economie », déclare aux « Echos » Michèle Pappalardo. La version qu'approuvera Bercy « fera l'objet d'un arrêté d'ici à la fin de l'année », précise Pierre Chabrol, porte-parole du label ISR et sous-directeur du financement des entreprises et du marché financier à la direction générale du Trésor.
Rapport critique
L'objectif ? Réformer une certification reconnue , plébiscitée par plus de 900 fonds totalisant près de 700 milliards d'euros d'actifs, mais sévèrement critiquée début 2021 dans un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF). Principal grief : le côté fourre-tout du label. Les fonds monétaires représentent par exemple 38 % des encours du label, selon une étude de la société de conseil Axylia publiée ce mardi. Or, par leur nature, la contribution de ces placements de trésorerie de court terme au financement durable de l'économie est très discutable.
« Nous voulons clarifier les types de fonds et classes d'actifs éligibles ou pas, qu'il s'agisse d'actifs cotés ou non cotés, des produits dérivés [parfois à visée spéculative, NDLR], des fonds indiciels ou monétaires…, indique la présidente du comité. Si ces actifs peuvent avoir une démarche ISR, nous voudrions ensuite déterminer un niveau d'exigence et des évolutions du process qui leur soient adaptés, comme c'est déjà le cas avec la déclinaison du label pour l'immobilier . »
Cette réflexion pourrait conduire à une segmentation du produit, avec un « socle de base clair et cohérent » et « plusieurs niveaux d'exigence » optionnels. « Nous réfléchissons à un label à niveaux, éventuellement avec des déclinaisons thématiques sur le climat, l'emploi ou la santé, précise la haute fonctionnaire. Mais il ne faut pas que cela soit trop compliqué. »
Dans cette logique, des discussions sont en cours en vue d'un « rapprochement » du label Greenfin (sans énergies fossiles) piloté par le ministère de la Transition écologique, et de l'initiative privée Finansol (épargne solidaire), qui souhaite rester indépendante. « Une base ISR identique pour tous les labels simplifierait le paysage et les méthodologies des professionnels », estime Michèle Pappalardo.
Transition climatique
En revanche, le nouveau cahier des charges ne devrait pas exclure formellement le financement de certains secteurs d'activité controversés, comme le charbon ou les énergies fossiles non conventionnelles (gaz de schiste…). Pourtant, « le recours à des exclusions doit être la priorité principale dans la refonte des exigences du label », « en retrait » sur ce point « des meilleures pratiques européennes », affirme l'IGF.
« Les exclusions systématiques sont compliquées, et complexes à gérer dans une logique de label transversal, justifie Sylvie Malécot, membre du comité du label et directrice auprès de l'Association française des investisseurs institutionnels. Le label va privilégier la notion d'inclusion de secteurs à enjeux, avec l'exigence d'une part du portefeuille pertinente au regard de la transition climatique. »
Le comité botte en touche sur la proposition d'un label transition climat, avancée dans le rapport remis à Bercy par Yves Perrier, président d'Amundi, le premier gérant d'actifs européen. « L'idée d'une gradation du label contient en elle-même la notion de transition, en accompagnant les entreprises dans leur transformation climatique », précise Michèle Pappalardo.
Pas sûr que les clients s'y retrouvent, alors que le produit « doit s'adresser en priorité à l'épargnant particulier, avec un message simple et concret », préconise l'IGF. « Nous avons un grand enjeu pédagogique, concède la présidente. En termes de communication, ce serait plus simple d'exclure certaines valeurs, mais pas plus efficace pour la transition climatique. Il faut bien l'expliquer. »
Appel d'offres
En parallèle du chantier du référentiel, le comité du label a déjà publié une première édition d'un « guide d'interprétation » destiné à clarifier entre les différentes visions des règles actuelles. Une nouvelle grille de tarification, plus favorable aux petites sociétés de gestion, est entrée en vigueur.
Le comité va aussi bientôt sélectionner l'organisme de Place qui hébergera son futur secrétariat général. Le choix initial du lobby Finance for Tomorrow a été annulé en mars, faute d'appel d'offres formel.